Le homard n’a pas de médecin

par | Juil 21, 2022 | 0 commentaires

Un homard grandit tout au long de sa vie ; cette croissance permanente est rendue possible grâce à la possibilité qu’a le homard de se fabriquer de nouvelles carapaces.
Lorsqu’il se sent trop à l’étroit dans sa carapace, il se réfugie sous un rocher, à l’abri des prédateurs, et y effectue sa mue. Vulnérable, il y restera donc le temps nécessaire pour que sa nouvelle carapace puisse se reconstituer. Et il jouira alors de sa nouvelle carapace jusqu’à ce que cette dernière devienne à nouveau trop petite. Le homard repartira alors à nouveau sous un rocher…
Mais si le homard avait un médecin et un psychiatre, il prendrait un somnifère ou un anti-dépresseur, pour soulager son inconfort, son anxiété, son stress… Cela gommerait peut-être ses symptômes, mais cela l’empêcherait de grandir.

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C’est sur cet exemple de vie que s’appuie Françoise Dolto, dans Le complexe du homard, pour illustrer le délicat passage de l’enfance à l’adulte (adolescence). Car la vie du homard enseigne que toute évolution est stimulée par des situations d’inconfort, de stress, de crise.
Sortir de sa zone de confort, traverser une crise, affronter un échec (tel qu’on les appelle, mais qu’on pourrait renommer « occasion de croissance ») sont en fait une excellente occasion de changer de carapace, de grandir… Fabrice Midal évoque ainsi cette histoire pour, dans un ouvrage consacré à la résilience, encourager à l’action et non pas :

– se conforter dans le déni, « se morfondre dans sa carapace devenue trop étroite » (Midal 2020 : 32),
– s’enfermer dans un statut de victime,
– « adopter la position du pseudo-sage qui contemple la situation avec distanciation » (Midal 2020 : 121),
– ou encore obéir à sa peur : « […] l’écouter mais ne pas lui obéir » (Midal 2020 : 52).

Or, si au lieu d’affronter les difficultés, on privilégie des solutions rapides en supprimant le stimulus, on renonce à l’action et donc à l’opportunité de grandir. « Les adultes à qui on donne des bêtabloquants ou des antidépresseurs n’élaborent pas de souvenirs tant qu’ils prennent ces substances qui empêchent l’émotion » (Cyrulnik 2002 : 121), qui empêchent le processus de résilience.

Même son de cloche dans Respire !, où Maud Ankaoua observe qu’« employé intelligemment, l’inconfort que nous ressentons peut être utilisé comme un levier pour nous élever » (Ankaoua 2020 : 105), pour autant que l’on ne cède pas à la tentation des paradis artificiels ou chimiques.

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