Le ver alcoolique

« Un jour, devant un public d’alcooliques, un orateur essayait de démontrer, une fois pour toutes, que l’alcool était l’abomination de la désolation. Il avait déposé sur l’estrade deux récipients identiques contenant l’un et l’autre un liquide incolore. L’un d’eux, déclara-t-il, est rempli d’aqua simplex, l’autre d’alcool pur. L’orateur fit tomber un petit ver de terre dans le premier récipient. Tout le monde vit le ver frétiller et grimper le long de la paroi intérieure du bocal pour arriver tout tranquillement à la surface. Puis il plongea le même ver dans le récipient d’alcool : la bestiole se désintégra littéralement sous les yeux de l’assistance.
– Quelle conclusion peut-on tirer de cette démonstration ? demanda alors l’orateur.
Quelqu’un, au fond de la salle, répondit à haute et intelligible voix :
– Si je comprends bien, quand on boit de l’alcool, on est sûr de ne jamais avoir de vers. »

(Dyer 2014 : 13)

Commentaires

Cette histoire est contée dans Vos zones erronées. Dans son ouvrage, Wayne Dyer insiste sur le fait que notre perception du monde serait fondée sur nos croyances. En effet, nos pensées limitantes nous serviraient de grille de lecture et d’interprétation de la réalité, nous amenant à sélectionner et à privilégier ce que l’on veut bien voir ou entendre, à l’instar de l’indien dans la ville :

« Il y a beaucoup de vers dans ce livre. Je veux dire par là que le lecteur y trouvera exactement ce qu’il voudra y trouver compte tenu des valeurs qui sont les siennes, de ses croyances, de ses préjugés et de sa propre vie. » (Dyer 2014 : 13-14)

À ce propos, Michael Misita, dans Se libérer des systèmes de croyances, observe de la même manière que notre vue ou notre écoute sélectionneraient les éléments qui viendraient confirmer nos croyances, et écarteraient, plus ou moins consciemment, ce qui pourrait les ébranler. Et cette illusion de réalité serait d’autant plus sournoise que « toutes les croyances contiennent une portion de vérité qui donne à l’ensemble du système de croyances le sentiment d’être vrai » (Misita 1999 : 34) :

« [Les êtres humains] ne cherchent pas la vérité, ils veulent seulement une certaine forme d’équilibre, et ils arrivent à se bâtir un monde à peu près cohérent sur la base de leurs croyances. Cela les rassure, et ils s’y accrochent inconsciemment. » (Gounelle 2008 : 49)